Comment le biogaz permet-il de décarboner les transports de marchandises ?


De plus en plus d’entreprises s’engagent dans la lutte contre le changement climatique et se fixent des objectifs en lien avec les recommandations du GIEC ou s’alignent avec celui de l’Europe afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050.

La migration des consommations vers les énergies renouvelables, notamment vers le Biogaz est une des solutions possibles pour décarboner l’activité. C’est dans cette optique de transition énergétique qu’un projet opérationnel de migration des flottes de camion vers le Biogaz est né au sein du Club des Entrepreneurs pour le Climat

Ce gaz vert dont la production provient de la méthanisation de différentes sources d’intrants tels que les déchets agricoles, les déchets urbains ou encore les résidus de traitement des eaux usées, peut remplacer le gaz naturel dans la production de chaleur mais aussi le diesel dans les transports via l’utilisation de véhicules équipés pour fonctionner au LNG.

Daniel Chevreul, Directeur général Approvisionnements Laitiers et Vincent Lebastard, Directeur Logistique en charge de la partie collecte, transport de matière liquide du Groupe Savencia (l’entreprise pilote de ce projet du Club) nous racontent leur expérience et les avancées de cette belle initiative regroupant plusieurs industriels membres du Club des Entrepreneurs pour le Climat.  

Un projet opérationnel qui a du sens

Le projet consiste à migrer des flottes de camions diesel vers le biogaz tout en développant les infrastructures de ravitaillement. Les premiers pilotes seront organisés autour de flottes de camions de collecte de laits opérées par divers industriels laitiers, pour ensuite s’élargir à toutes flottes de camions de marchandise.

Sept entreprises participent actuellement ensemble à ce projet. Le Groupe Savencia s’est proposé pour être l’entreprise pilote, accompagnée des sociétés Evergaz et Orygeen qui agissent en tant qu’appui technique grâce à leur expertise. Les cinq autres industriels que sont le Groupe Bel, le Groupe Rocher, LSDH et Triballat Noyal partagent également leurs connaissances et leurs retours d’expérience lors des groupes de travails et réunions.

“Lorsque l’on s’est réunis les premières fois avec certains membres du Club, il y avait 

des idées de projets intéressants mais il était compliqué de les réaliser individuellement car il fallait plusieurs stations d’approvisionnement en Biogaz et économiquement parlant, il fallait aussi être plusieurs acheteurs et utilisateurs de cette énergie. L’intérêt du Club était donc de s’associer pour répondre à ces obstacles, mettre en commun nos ressources et compétences pour commencer à identifier des sources disponibles et des utilisateurs potentiels  pour enfin  monter ce projet.” Daniel Chevreul

“ Le club est fédéré autour d’entreprises avec des ambitions communes de décarbonisation d’où l’intérêt de la réflexion et de l’expérimentation à travers ce groupe  projet opérationnel de migration au biogaz.” Daniel Chevreul

“Ce projet au biogaz a un double intérêt pour Savencia. Tout d’abord l’utilisation de cette énergie alternative nous permettrait de réduire notre impact environnemental. Puis en achetant du lait aux agriculteurs disposant de méthaniseurs, nous pouvons garder un lien fort avec eux. C’est intéressant car nous pourrons un jour utiliser une  source d’énergie produite par nos fournisseurs de lait dans notre collecte de laitière ”. Daniel Chevreul

“ Nos producteurs de lait sont aussi des producteurs de matières organiques qu’on peut valoriser en gaz, qui crée une sorte d’économie circulaire avec des émissions de gaz à effet de serre limitées. “ Vincent Lebastard

Un premier pilote à Azé

Les premières réunions de travail ont permis d’explorer plusieurs projets pilotes et la première initiative a pu démarrer.  

Daniel Chevreul nous détaille la démarche sur le site d’Azé aux abords d’une des fromageries du groupe Savencia : 

“En premier lieu il a fallu faire des essais de véhicules pour déterminer lequel était le mieux adapté et quel était son impact environnemental comparé aux autres. Ensuite, il était important de faire un état des lieux avec les différents membres du Club qui pouvaient être intéressés pour amener des véhicules dans les trois à quatre années à suivre sur le site d’Azé, que ce soit des membres ou des partenaires de leurs prestataires. Nous nous sommes également intéressés à des transporteurs de la région qui pouvaient avoir un intérêt pour le projet. Finalement, le Groupe Savencia a prévu d’investir dans un premier camion biogaz assez rapidement, dans les six à huit mois pour démarrer opérationnellement son utilisation.” Daniel Chevreul

Les véhicules testés

L’une des premières étapes de ce projet était de réaliser des tests sur des camions roulant uniquement grâce au Biogaz.

“Après avoir identifié le site d’Azé comme station d’approvisionnement, nous avons approché deux fournisseurs de matériel : Scania et Iveco. Par rapport à nos contraintes métier, nous cherchions un véhicule avec de la puissance et de l’ergonomie pour pouvoir transporter nos produits. Avant de commencer les essais, nous avons rédigé un cahier des charges en prenant en compte l’autonomie du matériel sachant que c’est un facteur limitant qui demandait une validation technique. Ces tests sur le site d’Azé ont montré que le fournisseur qui ressortait était Scannia car nous arrivions à couvrir la partie autonomie, la partie puissance et ergonomie, mais aussi la sécurité au niveau du poste de conduite qui donnait satisfaction.” Daniel Chevreul

Un Club dynamique et fédérateur

Le Club des Entrepreneurs pour le Climat est un lieu d’apprentissage et de partage d’expérience, mais aussi un catalyseur de synergies permettant de réaliser des projets concrets rassemblant plusieurs entreprises. 

“Pendant les réunions de travail, il y avait autour de la table différentes types d’entreprises à savoir celles d’activités opérationnelles qui pouvaient être intéressées par cette source alternative d’énergie, les entreprises fournisseurs de gaz de la station et enfin les entreprises qui expliquent le fonctionnement de cette source d’énergie notamment les certificats.

C’est important d’être plusieurs avec le même objectif pour avancer plus rapidement.

“Il est intéressant d’avoir ce partage de compétences et de connaissances car quand nous sommes seuls, on ne comprend pas nécessairement tous les fonctionnements de ces mécanismes. Surtout que toutes et tous avaient le même objectif et intérêt à vouloir faire bouger les choses et évoluer vers d’autres énergies. Ces trois types de compétences ont créé une collaboration constructive et apporté un dynamisme permettant d’aller plus vite sur un chemin qui parfois peut être sinueux.” Daniel Chevreul

Les prochaines étapes

Si les avancées de ce pilote sont prometteuses et que les tests ont donné satisfaction, il reste encore du travail pour pouvoir être opérationnel. Néanmoins, les référents du projet sont enthousiastes et positifs à l’idée de la mise en circulation de ce premier camion de collecte de lait roulant au Biogaz.

“ Nous espérons que pour le premier semestre 2021, il sera possible de mettre en circulation un véhicule.” Daniel Chevreul

Les entreprises du Club réunies au sein de ce Projet Opérationnel travaillent également sur d’autres pilotes permettant de couvrir des configurations différentes d’utilisation du biogaz dans les camions. 

“La première est la création d’une nouvelle installation dans un bassin industriel pour des flottes de camions destinées à tout type de transport de marchandise, et l’autre la construction d’une micro station sur un site existant d’une entreprise telle que le Groupe Rocher ou Sodial et destinée à approvisionner uniquement les transporteurs de cette entreprise.” Vincent Lesbatard

Gageons que ces autres sujets à l’étude se transformeront eux aussi en réalité rapidement.